
En clôture des Assises des départements, le Premier ministre a reconnu la gravité de la situation financière des territoires et annoncé plusieurs mesures fortes : doublement du fonds de sauvegarde, révision du Dilico, ouverture à une part de CSG et lancement d’un nouvel acte de décentralisation. Une séquence politique attendue par des départements à bout de souffle.
En prenant la parole à Albi pour clôturer les Assises nationales des départements, Sébastien Lecornu a choisi la franchise.
« Une situation triste », a-t-il résumé, constatant que rien n’avait véritablement changé depuis 2015, lorsqu’il était lui-même élu départemental. Au lieu de progrès, une inertie. « Plus la situation est difficile, plus les discours sont sucrés vis-à-vis des départements […], plus les mots sont doux, moins les solutions arrivent », a-t-il confié devant plusieurs centaines d’élus.
Une asphyxie budgétaire devenue structurelle Depuis plusieurs années, les départements alertent sur une mécanique devenue intenable. Les recettes s’effondrent, notamment en raison de la chute brutale des transactions immobilières, tandis que les dépenses sociales non pilotables explosent.
Le diagnostic posé par Départements de France est implacable :
– 54 départements dans le rouge fin 2025 ;
– 6 milliards d’euros de dépenses nouvelles imposées par l’État en deux ans et demi ;
– 8,5 milliards d’euros de baisse de recettes.
La moitié du pays départemental menace aujourd’hui de ne plus pouvoir assumer ses missions essentielles.
Un fonds de sauvegarde porté à 600 millions Pour répondre à cette urgence, le Premier ministre a confirmé le dépôt d’un amendement gouvernemental doublant le fonds de sauvegarde de 300 à 600 millions d’euros. Les critères de répartition restent inchangés, afin de cibler les territoires les plus fragilisés.
« Ça évite tout défaut, et donc ce n’est qu’une mesure conservatoire », a-t-il clarifié. Un pare-feu, pas une réforme.
Révision du Dilico : un revirement attendu Lecornu a ouvert une deuxième brèche politique en annonçant une révision du Dilico, dispositif de mise en réserve forcée des recettes fiscales. « Ce Dilico ne peut pas être demandé aux conseils départementaux qui sont dans la difficulté », a-t-il assuré. Le gouvernement s’engage à en plafonner le montant… et le nombre de départements concernés.
Une évolution majeure, tant l’outil était devenu l’un des symboles de l’incompréhension entre l’État et les territoires.
Une part de CSG pour les départements ? Pour la première fois, le Premier ministre s’est dit ouvert à l’idée de partager la CSG avec les départements. « Si l’on fait du conseil départemental la collectivité des solidarités, il est logique qu’il perçoive une part de CSG. »
Une déclaration qui pourrait modifier en profondeur l’architecture financière des dépenses sociales.
Un acte de décentralisation pour créer des ruptures Sébastien Lecornu veut désormais aller plus loin. Il a annoncé travailler à un nouvel acte de décentralisation centré sur : – la clarification des compétences sociales, médico-sociales et sanitaires ; – la possibilité de transférer aux départements 10 000 km de routes nationales non concédées ; – une réforme profonde des ARS, jugées trop éloignées du terrain.
« C’est avec les conseils départementaux que l’on va écrire le premier chapitre de la réforme de l’État », a-t-il insisté, appelant à un changement d’échelle.
L’allocation sociale unique arrive en décembre Un projet de loi sera présenté d’ici quelques semaines pour créer une allocation sociale unique. Elle fusionnerait prime d’activité, RSA et aides au logement afin de rendre l’ensemble plus lisible et plus cohérent. Les économies, promet le Premier ministre, seraient « de gestion » et non sur les bénéficiaires.
Les associations, elles, demandent des garanties pour les publics les plus vulnérables.
RÉACTIONS DES PRÉSIDENTS DE DÉPARTEMENTS
Les annonces de Sébastien Lecornu ont déclenché une série de réactions immédiates parmi les responsables départementaux.
François Sauvadet (UDI), président de Départements de France « C’est ce que nous demandions […]. Ça nous permettra d’avoir la tête hors de l’eau. »
Jean-Luc Gleyze (PS), président des départements de gauche Il salue l’ouverture sur la CSG : « Une vraie réponse pour solidifier un socle de recettes cohérent pour les départements. »
Nicolas Lacroix, président des départements de la droite et du centre « On est satisfaits, il faut qu’on prenne la perche qui nous a été tendue. »
Jean-Philippe Delbonnel





