Rédigé par Jean-Philippe Delbonnel - Président de l’Institut Quorum
Comme chaque année, l’Institut Quorum publie son baromètre national de l’attractivité départementale dans trois numéros consécutifs du Journal des Départements. Ce rendez-vous annuel, très attendu des élus comme des acteurs économiques, éclaire le regard que portent les Français sur leurs territoires. Premier volet, octobre : les Français expriment un attachement solide à leur département, mais avouent en méconnaître souvent les compétences et les politiques.

Un attachement affectif puissant
Le premier enseignement de l’édition 2025 est clair : les Français aiment leur département.
Près de huit habitants sur dix déclarent ressentir un lien fort avec leur territoire, qu’ils associent à la qualité de vie, à la proximité et aux paysages familiers. Pour beaucoup, le département représente un cadre rassurant, « à taille humaine », qui échappe aux excès de la centralisation parisienne comme à l’abstraction des grandes régions.
Cet attachement est une constante depuis plusieurs années. Il témoigne du rôle identitaire et culturel du département dans la vie quotidienne, comme point d’ancrage familial et social. Mais ce lien, aussi sincère soit-il, se double d’un constat plus préoccupant : les habitants connaissent mal leur département.

Une connaissance institutionnelle lacunaire
Lorsqu’on demande aux Français de citer spontanément les compétences de leur département, les confusions sont nombreuses. Beaucoup attribuent au département des missions qui relèvent en réalité des communes (urbanisme, écoles primaires) ou des régions (formation professionnelle, transports ferroviaires).
L’action sociale, elle, est bien identifiée : la protection de l’enfance, le RSA, l’accompagnement des personnes âgées ou en situation de handicap sont cités par une majorité. Mais d’autres compétences clés comme la gestion des collèges, les routes départementales, ou le soutien aux territoires ruraux restent largement sous-évaluées.
Cette méconnaissance traduit un problème de lisibilité.
Les Français aiment l’échelle départementale mais n’en perçoivent pas pleinement l’action concrète. Ce déficit de visibilité empêche les collectivités de transformer leur rôle réel en levier d’attractivité reconnu.
Un attachement qui ne suffit plus
Autre enseignement : près d’un Français sur deux se dit prêt à changer de département de résidence si un autre territoire lui offrait davantage d’opportunités professionnelles ou un meilleur cadre de vie.
Cette mobilité potentielle montre que l’attachement affectif, aussi fort soit-il, ne suffit plus à fidéliser les habitants. L’attractivité doit donc s’appuyer sur des politiques visibles et différenciantes.
La compétition territoriale est bien réelle : entre départements voisins, entre espaces ruraux et urbains, chacun cherche à se démarquer pour attirer talents, familles et entreprises. Dans ce contexte, la méconnaissance des compétences devient un frein majeur : on ne peut valoriser ce qui reste flou pour le grand public.

Un enjeu de communication stratégique
Le constat est sans appel : les départements souffrent d’un déficit de communication sur leurs politiques publiques.
Non pas qu’ils soient absents des débats, mais leurs actions manquent souvent de lisibilité et d’incarnation. Les habitants connaissent le nom de leur département, mais pas toujours ce qu’il fait concrètement pour eux.
Or, l’attractivité repose autant sur la qualité réelle des services que sur leur perception. La capacité à raconter un récit territorial, à donner à voir des réalisations et des priorités, devient un enjeu stratégique. Les Français aiment leurs départements, mais pour transformer cet attachement en attractivité durable, il faut que ces collectivités gagnent en visibilité.
Ce premier volet du baromètre confirme donc un paradoxe structurant : les Français sont profondément attachés à leur département, mais ils en connaissent mal les compétences et les politiques.
L’attachement affectif est solide, mais il doit être consolidé par une meilleure pédagogie et une communication plus claire.
Dans le prochain numéro (novembre), l’Institut Quorum analysera deux priorités décisives pour l’avenir : la santé et les mobilités, identifiées comme les moteurs principaux de l’attractivité départementale.






