Attractivité des métiers du soin et démographie médicale : comment lutter contre les déserts médicaux ?
Un enjeu vital pour notre système de soins
En France, le secteur du « prendre soin » fait face à un besoin urgent de renforts humains. Selon les données de France Travail, en 2024, plus de 330 000 projets de recrutement ont été recensés dans les métiers du soin et de l’accompagnement.
L’attractivité des métiers du social et de la santé est l’affaire de tous. En tant que chef de file des politiques sociales, le Département agit sur la protection de l’enfance, l’accompagnement des personnes âgées et handicapées, le RSA.... Ces missions dépendent d’une offre médicale de proximité : médecins, pharmaciens, infirmiers et structures de soins. Sans elle, l’efficacité de l’action sociale et le dynamisme du territoire sont fragilisés. Les habitants attendent donc
naturellement que le Département contribue à garantir la présence de soignants, faisant de lui un interlocuteur de confiance pour lutter contre les déserts médicaux, aux côtés de l’État et des ARS.
Départements : cap sur l’attractivité des métiers du prendre soin
Le Département de la Seine-Maritime s’associe à une démarche régionale, menée par la préfecture de Normandie, l’ARS, les départements du Calvados, de l’Eure, de la Manche et de l’Orne, ainsi que France Travail. Lancée officiellement le 25 février 2025, cette feuille de route commune vise à mieux valoriser les métiers de la santé et du médico-social, en agissant sur six priorités : promouvoir ces professions, adapter les formations, faciliter le recrutement et la fidélisation, améliorer les conditions de travail, renforcer la santé et la
sécurité des soignants et soutenir la démographie médicale pour garantir une offre de soins accessible partout sur le territoire.
Dans l’Ain, en 2024, le Département a réuni plus de 450 professionnels lors des Premières Rencontres des Pros de Santé à Bourg-en-Bresse, un temps fort d’échanges et d’innovations. Le lancement du site pros-sante.ain.fr offre désormais un guichet unique d’informations pour les soignants souhaitant s’installer ou se former dans le département. Ces actions, complétées par l’ouverture d’une première année de médecine à Bourg-en-Bresse et des négociations pour accueillir les 4e et 5e années, ont valu au Département de recevoir le D d’Or 2024 de l’attractivité médicale.
Des initiatives locales qui inspirent le national
Lors de son premier déplacement officiel, le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu a choisi la Saône-et-Loire, un territoire pionnier en matière d’innovation dans l’accès aux soins. C’est en effet ici qu’André Accary a lancé, avec succès, le premier centre
départemental de santé de France, permettant de salarier des médecins afin de lutter contre les déserts médicaux.
S’inspirant de cette initiative locale, le Premier ministre a annoncé la création d’un réseau national baptisé « France Santé », sur le modèle des Maisons France Services. L’ambition: garantir une offre de soins de proximité, accessible à moins de 30 minutes pour chaque citoyen.
Le projet prévoit la mise en place de 5 000 maisons de santé d’ici 2027, sur l’ensemble du territoire.
L’accueil familial : une solution de proximité pour les personnes en perte d’autonomie
Pour compléter l’offre de soins et répondre aux besoins des territoires, l’accueil familial se développe comme une solution innovante et humaine. Cette formule permet à des personnes âgées ou en situation de handicap de vivre dans un cadre familial sécurisé, tout en bénéficiant d’un accompagnement quotidien par des accueillants formés et encadrés.
L’entreprise MonSenior renforce ce dispositif au cœur des territoires, afin de répondre aux enjeux du parcours de vie et de la prise en charge des personnes vieillissantes. L’accueil familial contribue ainsi à renforcer la présence de professionnels de proximité, à soutenir les familles et à diversifier les solutions pour lutter contre les déserts médicaux.
Alcome renforce encore son soutien aux collectivités grâce à un nouveau dispositif !
Chaque année, des milliards de mégots finissent dans l’espace public, polluant les rues, les sols et les cours d’eau. Depuis 2021, l’éco-organisme Alcome, agréé par l’État, accompagne les communes dans la réduction de ces mégots, et contribue à rendre l’environnement plus propre. A ce jour, plus de 1 700 municipalités ont déjà contractualisé avec lui et l’éco-organisme veut aujourd'hui aller plus loin en renforçant son dispositif d’accompagnement et de soutien. Sa dernière innovation : un nouveau contrat permettant aux Intercommunalités (EPCI) de contractualiser avec lui pour mutualiser les moyens et démultiplier l’impact.
« Notre mission est claire : parvenir à une réduction de 40 % des mégots mal jetés d’ici 2026. Pour cela, nous devons simplifier les démarches et rendre nos dispositifs accessibles à toutes les communes, quelle que soit leur taille », rappelle Marie-Noëlle Duval, directrice générale d’Alcome.
Jusqu’ici, chaque mairie gérait seule son contrat : installation de cendriers de rue et d’équipements, distribution de cendriers de poche, bilans annuels, coordination des campagnes de prévention… Des démarches souvent lourdes pour les communes de moins de 1 000 habitants.
Désormais, grâce à la contractualisation à l’échelle intercommunale, les EPCI peuvent prendre le relais. « Ce dispositif est né d’un double constat, explique Jonathan Decottignies, directeur des opérations et du déploiement chez Alcome. D’une part, les intercommunalités ont la capacité d’agir de manière coordonnée et à grande échelle. D’autre part, elles permettent aux petites communes de bénéficier d’un accompagnement qu’elles ne pourraient pas assumer seules. »
L’EPCI pourra notamment centraliser les outils de prévention, coordonner les campagnes de communication et gérer le contrat. Les communes, elles, pourront garder la main sur les actions locales. Un système simplifié qui renforce en outre la cohérence des messages auprès des habitants : « Une petite commune isolée peut sensibiliser ses habitants, mais si ces derniers se déplacent dans la commune voisine, l’impact reste limité. À l’échelle intercommunale, les actions touchent l’ensemble du bassin de vie », poursuit Jonathan Decottignies.
Un premier test grandeur nature a déjà eu lieu fin 2024 à Dunkerque : toutes les communes de la Communauté urbaine ont choisi de passer par l’intercommunalité pour contractualiser avec Alcome.
Un poste dédié a même été créé pour piloter la lutte contre les mégots et les déchets abandonnés et les premiers résultats sont jugés « très encourageants ».
Au-delà de ce nouveau contrat, Alcome poursuit son travail de sensibilisation. En 2025, plus de 4 millions de cendriers de poche ont été distribués lors d’événements majeurs comme le Tour de France ou les différents festivals de l’été, et l’éco-organisme a intensifié ses campagnes de prévention contre les incendies liés aux mégots.
Avec 100 % des départements couverts par un contrat et plus de 40% de la population couverte l’objectif est clair : élargir encore le maillage territorial. « Nous voulons convaincre de nouvelles communes et intercommunalités de rejoindre la démarche, pour qu’ensemble, nous fassions reculer durablement la pollution des mégots », conclut Marie-Noëlle Duval.
Françoise Gatel, Ministre déléguée chargée de la Ruralité, du Commerce et de l'Artisanat de France
Ministre déléguée chargée de la Ruralité, Françoise Gatel a entamé en février dernier un Tour de France des Ruralités afin de dresser un premier bilan à mi-parcours du plan France Ruralités (2023-2027). Pour l’ancienne sénatrice d’Ille-et-Vilaine, présidente de la délé-gation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentra-lisation, « la ruralité est un espace d’innovation, d’équilibre et d’avenir pour la République ». Pour le Journal des Départements, elle revient sur son Tour de France des Ruralités et détaille ses priorités en matière de logement, de mobilité, de santé, sans oublier les enjeux des finances publiques pour renforcer la cohésion territoriale.
Vous avez entrepris un Tour de France des Ruralités et le plan France Ruralités arrive aujourd’hui à mi-parcours. Quel bilan tirez-vous de cette première étape sur le terrain ?
Ce que je constate au fil de mes déplacements, c’est une formidable vitalité des territoires ruraux.
Depuis mon entrée en fonction, j’ai déjà visité plus de 44 départements ruraux à la rencontre des habitants, des élus et des acteurs locaux. Partout, je vois des initiatives ingénieuses, des projets concrets portés par des élus engagés. La ruralité, loin d’être immobile, constitue un lieu d’innovation exemplaire, un laboratoire d’idées pour l’avenir du pays. Nos 22 millions de concitoyens ruraux, répartis dans 88 % des communes françaises, le prouvent au quotidien.
Bien sûr, les difficultés existent – qu’il s’agisse de l’accès aux soins, de la démographie scolaire, des mobilités ou du logement – mais, je le crois profondément, la ruralité est l’avenir de notre pays.
L’État doit accompagner les solutions qui émergent du terrain plutôt que d’essayer d’inventer depuis Paris la solution miraculeuse pour nos communes rurales. Où que je j’aille, je vois des innovations
portées par les élus locaux. La loi doit faciliter ces initiatives et encourager ces démarches plutôt que les freiner.
« Le logement est un pilier de la revitalisation rurale »
À mi-parcours de mon Tour de France des Ruralités, je dirais que le bilan est globalement positif. De nombreux élus se disent très satisfaits des mesures déjà mises en œuvre. Le plan France Ruralités, fort de ses 32 mesures, a apporté un cadre et des moyens appréciés. Pour autant, ce plan doit être conforté et renforcé sur certains volets stratégiques. Voilà pourquoi nous avons engagé plusieurs missions d’évaluation afin de passer au crible chaque mesure et d’ajuster notre action. Par exemple, le programme Villages d’Avenir – qui accompagne l’ingénierie de milliers de petites communes – fait l’objet d’une inspection dédiée, car il offre une réponse précieuse aux maires dépourvus de services techniques. Ce temps d’évaluation doit nous permettre d’amplifier les réussites, d’ajuster ce qui doit l’être et de proposer de nouvelles mesures destinées à améliorer la vie quotidienne de nos concitoyens. En somme, ce Tour de France des Ruralités de mi-mandat n’est pas une fin en soi, mais une étape décisive pour préparer la suite : montrer ce qui marche, corriger ce qui ne fonctionne pas et remettre de l’élan partout où c’est nécessaire.
Le logement est un enjeu prioritaire dans de nombreux territoires ruraux, où l’on manque parfois d’habitations adaptées. Quelles actions comptez-vous mener en la matière ?
Le logement en ruralité représente en effet un défi majeur. Nous avons des communes qui disposent de foncier disponible, mais pas encore des logements suffisants ou adéquats pour attirer de nouvelles familles. Un chiffre parle de lui-même : 34 % des passoires thermiques en France se situent dans des zones rurales. C’est énorme ! Et cela signifie que la rénovation énergétique du bâti rural est un impératif autant écologique que social. Pour avancer sur ce sujet, je travaille main dans la main avec Valérie Létard, la ministre du Logement, pour accélérer la résorption de ces logements indignes ou énergivores. Nous voulons soutenir les maires bâtis-seurs en milieu rural, ceux qui veulent construire ou rénover pour offrir à leurs administrés des habitations de qualité mais également ceux qui luttent contre la vacance de logement, un phénomène qui frappe fortement les zones rurales.
Il faut aussi adapter nos règles d’urbanisme aux réalités rurales. Je pense, par exemple, à la mobilisation des biens sans-maîtres et des friches, à la simplification des règles d’urbanisme ou aux objectifs de la loi ZAN (zéro artificialisation nette) : ils sont louables pour lutter contre l’étalement urbain, mais ne doivent pas figer le développement des petits villages. J’estime qu’il faut introduire de la souplesse dans ces normes, pour permettre la création/rénovation de logements là où il en manque – tout en restant exemplaires sur la préservation de nos sols. C’est un équilibre à trouver entre préservation et attractivité : nos campagnes doivent pouvoir accueillir de nouvelles populations, de nouveaux projets, sans renoncer à leur identité. Le logement est donc un pilier de la revitalisation rurale : nous y travaillons activement, en mobilisant France Rénov’, les financements du Fonds vert et tous les dispositifs capables d’aider les élus ruraux à bâtir l’avenir de leur commune.
La mobilité demeure un défi crucial dans les campagnes. Beaucoup d’habitants, notamment les jeunes, risquent l’isolement faute de transports adaptés. Comment comptez-vous apporter plus de souplesse, de proximité et d’innovation dans les mobilités rurales ?
Sur le volet mobilité, il faut être lucide, on ne pourra jamais calquer en milieu rural le modèle de transport des grandes villes. Il n’est ni réaliste ni efficace de vouloir faire passer des bus toutes les 10 minutes dans nos villages ou de maintenir des trains partout où la fréquentation est très faible. J’ai l’habitude de dire que nous devons inventer la « mobilité du premier kilomètre » : c’est souvent la toute première distance, celle qui relie le domicile à la gare ou au bourg centre le plus proche, qui est la plus critique en zone rurale. Si l’on apporte une solution pour ce premier kilomètre, on libère d’un coup l’accès à l’emploi, à la formation, aux loisirs pour un grand nombre de personnes.
Cette mobilité de proximité exige souplesse et innovation. J’ai vu des initiatives formidables sur le terrain. Par exemple, dans la commune de Chenevelles dans la Vienne, qui compte 440 habitants, la mairie a acquis deux voitures sans permis qu’elle met à disposition des jeunes de 16-18 ans qui n’ont pas encore le permis de conduire.
En échange, ces jeunes consacrent quelques heures de leur temps à des services pour la collectivité, petits travaux, aide aux aînés, etc. C’est une initiative remarquable que l’État a choisie de soutenir, et qui permet de lutter concrètement contre ce que j’appelle l’assignation à résidence des jeunes ruraux. Quand on n’a ni transport en commun ni permis, vivre à la campagne ne doit pas signifier l’enfermement à domicile. Chenevelles nous montre une voie inspirante, et je souhaite encourager d’autres territoires à la reproduire. D’ailleurs, l’Association des maires ruraux de France (AMRF) envisage de généraliser ce type de dispositifs avec notre appui. Autre axe d’innovation : le soutien au covoiturage du quotidien et à l’autopartage. Beaucoup de trajets en zone rurale peuvent être partagés, mais il faut une organisation minimale.
Nous soutenons le développement de solutions adaptées aux réalités de chaque territoire : le Fonds vert comprend ainsi 30 millions d’euros pour soutenir ces projets, dédiés spécifiquement à la ruralité, ce sont des crédits précieux pour aider les autorités organisatrices de mobilité à réaliser leurs projets. Parfois, créer une simple plateforme de mise en relation entre voisins peut résoudre le problème du transport domicile-travail pour des dizaines de personnes. Je crois énormément à ces solutions collaboratives et de proximité.
Enfin, pour nos jeunes, toujours, la question de la mobilité rejoint celle de l’égalité des chances. Il n’est pas acceptable qu’un lycéen ou un étudiant renonce à ses études faute de pouvoir se déplacer.
Nous travaillons donc de concert avec ma collègue de l’Enseignement supérieur, Élisabeth Borne, afin de développer des antennes universitaires de premier cycle dans les villes moyennes, et des campus connectés en milieu rural. L’objectif est que les jeunes ruraux puissent suivre une formation supérieure sans devoir quitter leur territoire ou engager des frais exorbitants de logement en ville.
C’est aussi cela la mobilité, rapprocher l’offre de formation et de services des habitants, plutôt que de toujours obliger les habitants à parcourir des kilomètres. Proximité et innovation, voilà le cap à tenir pour les mobilités rurales de demain.
L’accès aux soins reste difficile dans de nombreuses zones rurales, et la lutte contre les déserts médicaux est un enjeu pressant. Comment envisagez-vous d’inventer de nouvelles solutions pour améliorer la santé en milieu rural ?
La santé en territoire rural est en effet l’une de mes préoccupations centrales. Nous devons innover et sortir des sentiers battus pour garantir à tous nos concitoyens un accès aux soins, où qu’ils vivent.
J’estime que l’action publique doit s’orienter résolument vers une politique d’« aller-vers » les patients isolés. Concrètement, cela signifie déployer des solutions mobiles et de proximité. Nous avons commencé à le faire : par exemple avec les « médicobus », ces cabinets médicaux itinérants qui vont à la rencontre des habitants des communes sans médecin. C’est une réponse très pratique pour assurer des consultations régulières là où il n’y a plus de cabinet en dur. De même, nous encourageons les stages délocalisés de jeunes médecins en formation dans les cabinets ruraux ou les hôpitaux locaux. Il est crucial que les futurs médecins passent du temps sur le terrain rural durant leur cursus, pour qu’ils s’y forment et, pourquoi pas, qu’ils aient envie ensuite de s’y installer. J’attache aussi beaucoup d’importance à la question de la santé mentale en milieu rural, qui est souvent un besoin invisible. Nous aidons à la mise en place d’équipes mobiles de santé mentale, des psychologues ou psychiatres itinérants capables d’intervenir périodiquement dans les petites communes qui ne disposent d’aucun service en la matière. C’est indispensable, par exemple, pour accompagner des adolescents, des personnes isolées ou en détresse psychologique loin des centres
urbains. Plus généralement, nous misons sur la télémédecine et les outils numériques. Des cabines de téléconsultation ont ainsi été installées dans certaines mairies ou agences postales, et elles rendent de fiers services. Il faut multiplier ces nouvelles approches.
Enfin, nous continuons bien sûr à renforcer l’offre de soins de proximité classique : soutien à l’implantation de maisons de santé pluri-disciplinaires, recrutement d’assistants médicaux pour décharger les médecins des tâches administratives, incitations financières pour les jeunes médecins qui choisissent de s’installer en zone sous-dotée… Tous ces dispositifs commencent à porter leurs fruits, mais il faut aller encore plus loin. Inventer de nouvelles solutions implique d’expérimenter,
d’évaluer et de généraliser rapidement ce qui marche. Mon rôle, c’est de lever les obstacles réglementaires si nécessaire, de trouver des financements, et de fédérer tous les acteurs – ARS, départements, professions de santé, associations – autour d’un objectif simple : que chaque Français, où qu’il vive, puisse se soigner correctement sans parcourir des dizaines de kilomètres.
C’est un droit fondamental et nous y travaillons avec détermination.
« Mon rôle est de lever les obstacles réglementaires, de trouver des financements, et de fédérer tous les acteurs »
Les collectivités rurales sont particulièrement préoccupées par les efforts budgétaires qui leur sont demandés. Par ailleurs, vous insistez souvent sur la nécessité de « réarmer l’État dans les territoires ». Où en est-on sur ces questions de finances locales et de cohésion territoriale ?
Je veux d’abord envoyer un message de sérénité aux élus locaux : nous avons entendu leurs préoccupations et nous y avons apporté des réponses concrètes. En fin d’année dernière, le projet de loi de finances initial prévoyait un effort très important, on parlait de 5 milliards d’euros
d’économies demandés aux collectivités locales, ce qui a légitimement suscité une levée de boucliers. Il faut rappeler dans quel contexte cela s’est fait. Cette « copie initiale » budgétaire a été préparée dans l’urgence, en à peine quinze jours, car Michel Barnier, alors Premier ministre, avait découvert un déficit plus abyssal que prévu dans les comptes de l’État.
Ce plan de rigueur a ensuite été débattu et amendé au Parlement. Grâce notamment au travail du Sénat, l’effort demandé aux collectivités a été nettement réduit, de 5 milliards à environ 2 milliards d’euros en 2025. C’est un compromis raisonnable et absorbable, même si je sais que cela reste un effort non négligeable pour nos communes et nos départements. Le contexte budgétaire national, je ne le cache pas, demeure extrêmement tendu – il l’a même été davantage après la censure partielle du Conseil constitutionnel, qui a coûté plus de 10 milliards d’euros au budget de l’État. Mais nous avançons avec pragmatisme. La conférence nationale sur le financement des collectivités locales, annoncée par le gouvernement, va se tenir très prochainement. Ce sera l’occasion de mettre tout sur la table, d’examiner comment garantir des ressources pérennes aux collectivités tout en rétablissant nos comptes publics. Je veillerai personnellement à ce que les spécificités des territoires ruraux y soient entendues.
Quand je dis qu’il faut réarmer l’État dans les territoires, ce n’est pas un slogan, c’est une nécessité. Concrètement, cela signifie redonner aux services déconcentrés de l’État les moyens d’accompagner les élus locaux au plus près du terrain. Par exemple, nous voulons placer les antennes locales des grandes agences nationales comme France Travail ou les Agences Régionales de Santé, sous l’autorité fonctionnelle des préfets. Ainsi, sur des enjeux comme la santé, l’emploi, les transports, on aura une vraie coordination de l’action de l’État au niveau local. C’est une réforme structurelle en cours, cohérente avec la vision du Premier ministre François Bayrou, qui a fait de la décentralisation partenariale un axe fort de sa politique.
En parallèle, nous soutenons les dynamiques locales. J’ai appuyé plusieurs propositions de loi visant à assouplir certaines contraintes pesant sur les communes. Je pense à la loi qui a enfin redonné la liberté aux communes rurales de conserver la compétence « eau et assainissement » si elles le souhaitent, plutôt que de la transférer de force à l’intercommunalité. C’est une question de bon sens et de respect de la volonté locale, et nous l’avons fait. De même, je défends avec ferveur la proposition de loi sur le statut de l’élu local, que j’avais déposée au Sénat en 2024. Il est temps de mieux reconnaître l’engagement des maires et des élus ruraux, qu’ils puissent s’engager sans y laisser leur santé ni leurs finances personnelles. J’espère son adoption définitive avant les municipales de 2026, et je reste très mobilisée sur ce dossier.
Enfin, un mot sur l’Europe : la politique de cohésion européenne est vitale pour nos territoires ruraux. Je veux rassurer à ce sujet, malgré les contraintes budgétaires liées notamment aux dépenses de défense, tous les gouvernements européens sont d’accord pour ne pas amputer l’enveloppe de cohésion dans le cadre du prochain budget de l’Union 2028-2034. Autrement dit, les fonds européens, comme le FEDER ou le FSE, continueront d’appuyer nos projets locaux de développement. C’est crucial, car la cohésion territoriale se joue à toutes les échelles, communale, départementale, nationale et européenne. Pour conclure, je dirais que nous devons faire preuve de volontarisme et de concertation. Les territoires ruraux ne demandent pas un traitement de faveur, ils demandent les moyens de participer pleinement au destin du pays. Transports, emploi, santé… La ruralité n’est pas un simple supplément d’âme ou un arrière-pays nostalgique, elle est essentielle à l’avenir de notre pays. C’est un moteur à part entière pour la France de demain, et je m’attache, chaque jour, à ce que nos politiques publiques en soient à la hauteur.
« Quand je dis qu’il faut réarmer l’État dans les territoires, ce n’est pas un slogan, c’est une nécessité. Concrètement, cela signifie redonner aux services déconcentrés de l’État les moyens d’accompagner les élus locaux au plus près du terrain. »