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En 2030, un Français sur trois aura plus de 60 ans. Plus de 8,6 millions auront dépassé 75 ans. Au-delà des enjeux de santé publique, c’est un défi collectif : construire des territoires solidaires et adaptés à chaque âge de la vie. Dans cette transformation, les bailleurs sociaux sont des acteurs de premier plan aux côtés des collectivités.


Le parcours résidentiel senior chez les bailleurs sociaux


L’allongement de la vie interroge : comment adapter le parc de logements aux parcours résidentiels dans toutes leurs diversités ? Ces organismes, présents sur tout le territoire, intègrent désormais au cœur de leurs politiques d’habitat le lien social, l’accompagnement des fragilités et l’accès aux soins.


DomoFrance, filiale d’Action Logement, fait beaucoup pour l’adaptation de son parc de logements : rénovation, renouvellement urbain, aménagement de quartiers inclusifs.


Gironde Habitat, avec son dispositif “ELLA Car” primé en 2023, va à la rencontre des seniors en zone rurale pour recréer du lien, repérer les fragilités et les accompagner à domicile.


D’autres acteurs comme Axentia, Orvitis, Groupe Deux Fleuves ou encore l’OPAC 71 développent des offres d’habitats adaptés et évolutifs. Axentia, par exemple, compte plus de 230 établissements accueillant 12 000 personnes, tandis qu’Orvitis et Deux Fleuves Seniors déploient des résidences et logements adaptés de proximité destinés aux seniors en situation de vulnérabilité.


L’habitat intermédiaire : une réponse à renforcer


L’habitat intermédiaire est une réponse entre le domicile individuel des seniors et l’EHPAD. L’accompagnement humain

et le projet de vie sociale sont au cœur de ces dispositifs.


Objectif ? rompre l’isolement et maintenir l’autonomie.


Face au vieillissement de la population, ce modèle connaît une demande très forte, mais doit se développer. Le schéma domicile/ EHPAD demeure la norme, freiné par le manque de financements pérennes et de visibilité.


Pourtant, selon l’USH, 58 % des logements d’habitat intermédiaire proviennent du parc social, signe du rôle structurant des bailleurs.


La connaissance des territoires, la maîtrise de l’ingénierie immobilière, une légitimité sociale locale et un accès direct à la demande, ces atouts en font des acteurs clés pour accélérer la démocratisation de l’habitat intermédiaire. Plusieurs leviers peuvent être activés : prioriser l’accessibilité, développer des projets à taille humaine, favoriser la mixité sociale et générationnelle et s’appuyer sur les partenaires de terrain (comme MonSenior) pour co-construire et faire vivre ces habitats.


Cas concret : Axentia, partenaire pionnier de MonSenior, agréée ESUS


Depuis 2023, Axentia, bailleur social engagé, et MonSenior, acteur de référence de l’accueil familial, conjuguent leurs expertises pour développer des maisons d’accueil familial accessibles et de haute qualité, au bénéfice des résidents comme des professionnels accueillants.


Depuis le début de cette collaboration, 54 maisons MonSenior sont portées par Axentia en Auvergne-Rhône-Alpes. Cela représente donc 162 places d’hébergement pour les personnes âgées ou en situation de handicap.


“Avec Axentia, MonSenior a bâti un modèle de collaboration étroit avec les organismes de logements sociaux. Nous sommes aujourd’hui en phase d’expansion, convaincus que les bailleurs sociaux sont en première ligne pour répondre aux enjeux liés au vieillissement de la population.” explique C. Burtin, DG. de MonSenior.


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“Notre expertise nous permet d’apporter des solutions concrètes aux gestionnaires et d’être réactifs dans la concrétisation de leurs projets. Nous sommes heureux de poursuivre l’accompagnement de MonSenior dans le développement de l’offre d’accueil familial. Ce partenariat illustre notre volonté commune de proposer des formes d’habitat innovantes et adaptées aux aînés sur les territoires à l’image des sociétés du Groupe Habitat En Région et des Caisses d’Epargne.” ajoute G. Leclerc, DG. d’Axentia


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  • 10 min de lecture

Par Mathilde Haas

Mathilde Haas - Avocat à la Cour www.mathildehaas.fr
Mathilde Haas - Avocat à la Cour www.mathildehaas.fr

Le juge administratif ne peut pas enjoindre au Gouvernement de prendre des mesures pour lutter contre les déserts médicaux


L’Union fédérale des consommateurs - Que Choisir demandait au Conseil d’État d’annuler la décision implicite par laquelle le Gouvernement avait rejeté sa demande tendant à ce que soient prises des mesures législatives contraignantes afin de remédier aux déserts médicaux et d’enjoindre au Gouvernement, sous astreinte, de prendre ces mesures.


Le Conseil d’État rappelle qu’il lui appartient d’apprécier si le refus de l’administration de prendre des mesures pour faire cesser une obligation légale lui incombant est entaché d’illégalité. En revanche, il ne peut, « se substituer aux pouvoirs publics pour déterminer une politique publique ou de leur enjoindre de le faire ». La requête a été rejetée.


CE, 1 octobre 2025, n°489511



Seul l’un des conjoints respectifs des parents d’une personne peut établir un lien de filiation adoptive


La requérante reprochait aux dispositions de l’article 345-2 du code civil relatives à l’adoption de faire obstacle « à l’adoption d’une personne par le conjoint de l’un de ses parents lorsque celle-ci a déjà été adoptée par le conjoint de son autre parent », ce qui instituerait notamment « une différence de traitement injustifiée entre les beaux-parents d’une même personne, dès lors que l’un des beaux-parents serait empêché de la faire bénéficier des conséquences familiales, sociales et patrimoniales d’une adoption, du fait de son adoption préalable par l’autre beau-parent ». Était également invoquée une atteinte disproportionnée « au droit au respect de la vie privée et au droit de mener une vie familiale normale » du fait de l’impossible reconnaissance juridique « des liens familiaux et affectifs établis entre un enfant et son beau-parent ».


Le Conseil constitutionnel reconnaît que les dispositions instituent « une différence de traitement entre les conjoints respectifs des parents d’une personne » dès lors que seul l’un d’entre eux peut établir un lien de filiation adoptive avec elle. Toutefois, il ressort de son analyse que « le législateur a entendu garantir à la personne adoptée une stabilité dans ses liens de parenté, compte tenu notamment des difficultés juridiques qui résulteraient de l’établissement de multiples liens de filiation adoptive » et que ce 

« motif d’intérêt général pouvait justifier une différence de traitement », qui « est en rapport avec l’objet de la loi. ».


Dès lors, le Conseil constitutionnel juge qu’il ne lui appartient pas 

« de substituer son appréciation à celle du législateur sur les conséquences qu’il convient de tirer, en matière de filiation adoptive, de la situation particulière des conjoints des parents d’une personne ».


Les dispositions contestées, « qui ne méconnaissent pas non plus le droit au respect de la vie privée, ni l’exigence constitutionnelle de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit » ont été déclarées conformes à la Constitution.


Conseil constitutionnel, décision n° 2025-1170 QPC du 9 octobre 2025


Le Conseil d’État rend public un avis consultatif sur le projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales


Le Conseil d’État n’exerce pas qu’une activité contentieuse ! Il rend également des avis consultatifs sur des projets de loi. C’est ce qui l’a amené à se prononcer sur un projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales visant à améliorer la détection de la fraude ainsi qu’à adapter les moyens de lutte aux nouvelles formes pour renforcer les sanctions.


Dans cet avis, le Conseil d’État relève que « le projet de loi ne contient pas de réforme d’ampleur des outils de lutte contre les fraudes sociales et fiscales, mais rassemble diverses dispositions visant à améliorer, par des modifications ciblées de procédures et mécanismes existants, l’efficacité des contrôles, des sanctions et des procédures de recouvrement des créances ». Il propose quelques modifications, notamment de circonscrire la dérogation au secret de l’enquête et de l’instruction prévue par le projet de loi permettant aux agents des douanes et des services fiscaux chargés des enquêtes judiciaires de communiquer à leurs collègues chargés d’une mission de contrôle les informations susceptibles d’être utiles à son exercice.


D’autres dispositions du projet de loi appellent des observations du Conseil d’État. Il s’agit de celles « visant à autoriser France Travail à opérer des saisies administratives à tiers détenteur » ou lui permettant « de retenir la totalité des versements à venir d’allocations-chômage en cas d’indus engendrés par un manquement délibéré ou des manœuvres frauduleuses », ou encore de dispositions relatives à « la création d’un nouveau régime de sanctions administratives à l’encontre des organismes de formation professionnelle ».


Avis consultatif sur le projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales délibéré et adopté par l’Assemblée générale du Conseil d’État dans sa séance du jeudi 11 septembre 2025


Prise en compte de l’autorisation de prolonger son activité au-delà de la limite d’âge, même intervenue postérieurement à cette limite d’âge


A l’occasion d’un contentieux relatif au calcul d’une pension de retraite, le Conseil d’État a jugé que pour l’application de « l’article 1-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984, désormais codifié à l’article L. 556-5 du code général de la fonction publique », relatif à la prolongation d’activité au-delà de l’âge limite, il incombe à l’autorité chargée de la liquidation des droits à pension « de tirer les conséquences légales d’une décision, même illégale, relative à sa carrière, tant que cette décision n’a pas été annulée ou retirée, à moins qu’elle ne revête le caractère d’un acte inexistant, d’une reconstitution de carrière fictive intervenue à titre purement gracieux ou qu’elle ait pour effet de maintenir un fonctionnaire en prolongation d’activité au-delà de la durée des services ».


Pour autant, selon le Conseil d’État, « la circonstance qu’une autorisation de prolonger son activité au-delà de la limite d’âge, demandée par un agent avant la survenance de celle-ci, serait intervenue postérieurement à cette limite d’âge, ne saurait, par elle-même, justifier qu’il ne soit pas tenu compte de cette prolongation dans le calcul des droits à pension par l’autorité chargée de les liquider ».


Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 17 octobre 2025, n°497247


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Le Conseil d’État rend public un avis consultatif sur le projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales


Un sapeur-pompier professionnel demandait l’annulation de l’arrêté par lequel le président du conseil d’administration de son SDIS a mis un terme à la concession de logement à titre gratuit pour nécessité absolue de service dont il bénéficiait depuis 1989. La concession avait dans un premier temps été renouvelée alors que les sapeurs-pompiers professionnels avaient été transférés au SDIS. 

Selon le requérant, son logement constituait un avantage en nature en matière de rémunération acquis qu’il était en droit de conserver en application de l’article L1424-41 du code général des collectivités territoriales et de la convention de transfert du personnel communal.


La Cour administrative d’appel n’est pas de cet avis. Elle estime 

« qu’un sapeur-pompier professionnel ne peut se voir attribuer un logement pour nécessité absolue de service qu’à la condition qu’il occupe un emploi dont le conseil d’administration du SDIS a prévu par une délibération qu’il ouvrait droit à un tel logement, en raison des contraintes attachées à cet emploi ». Elle en déduit que « la concession d’un logement pour nécessité absolue de service est attachée à l’emploi occupé par l’agent et non à sa personne, ce qui fait obstacle, comme l’ont estimé sans erreur d’appréciation les premiers juges, à ce qu’elle soit regardée comme un avantage individuellement acquis ».


CAA Nantes, 6e ch., 30 septembre 2025, n° 24NT02109


Injonction, sous astreinte, pour un maire de recouvrer les indemnités illégalement perçues par des élus : quand la défense motive la décision défavorable de la Cour


La Cour administrative de Nantes était saisie de l’exécution de son arrêt n° 23NT02860 du 16 février 2024 enjoignant au maire de Cholet, dans un délai de trois mois, de justifier que le titre de recette émis d’un montant de 443 779,96 euros n’est « pas inférieur à celui des indemnités de fonction versées aux adjoints au maire et conseillers municipaux délégués, en application de la délibération annulée qui fixait les indemnités de fonctions des élus ».


Selon les requérants, la somme totale des indemnités des élus à recouvrer serait d’un montant bien supérieur au titre de recettes émis, évoquant une somme de 720 461,72 euros.

Pour juger que la commune n’a pas entièrement exécuté l’arrêt, la Cour se fonde sur les écritures en défense de la commune elle-même qui rappelle que, compte-tenu des recours présentés contre les titres de recette émis, la force exécutoire de ces derniers a été automatiquement suspendue et ne lui permet, dès lors, pas de justifier du recouvrement effectif des sommes litigieuses.


La Cour enjoint, ainsi, une nouvelle fois, au maire de Cholet de procéder au recouvrement effectif des sommes « devant être remboursées par les adjoints au maire et conseillers municipaux délégués […] et de justifier de ce recouvrement effectif », dans un délai de deux mois, sous astreinte de 750 euros par jour de retard passé ce délai.


CAA de Nantes, 4ème chambre, 26 septembre 2025, n°24NT02377


Retraite d’office pour invalidité : la méconnaissance du délai de 10 jours pour consulter son dossier soumis à la commission de réforme prive l’agent d’une garantie


Un agent avait été mis à la retraite d’office pour invalidité. Le tribunal administratif avait annulé cet arrêté et enjoint à la communauté de communes de réintégrer l’agent dans son cadre d’emplois et de reconstituer sa carrière. Sur pourvoi en cassation de la communauté de communes contre l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille qui avait rejeté l’appel formé contre le jugement, le Conseil d’État rappelle, sans surprise, que le délai de dix jours mentionné par l’arrêté relatif aux commissions de réforme des agents de la FPT et de la FPH « constitue, pour l'agent concerné, une garantie visant à lui permettre de préparer utilement son intervention devant la commission de réforme et, par suite, à assurer le caractère contradictoire de la procédure. Par conséquent, la méconnaissance de ce délai a pour effet de vicier la consultation de cette commission ».


Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 26 septembre 2025, n°488244


L’administration n’est pas fondée à demander l’annulation d’un 

« contrat de rupture conventionnelle » illégal qui, au demeurant, relève du recours pour excès de pouvoir et non pas du contentieux contractuel


En 2011, la chambre de métiers et de l'artisanat du Val-d'Oise et le directeur du centre de formation des apprentis ont signé un document intitulé « séparation à l’amiable – rupture conventionnelle » prévoyant la fin de leur collaboration, la renonciation à tout recours et le versement de plus de 100 000 euros. Cet acte a été annulé par le tribunal administratif puis la Cour administrative d’appel a annulé le jugement.


Saisi d’un pourvoi en cassation, le Conseil d’État estime qu’eu « égard à la nature particulière des liens qui s'établissent entre une personne publique et ses agents publics, les contrats par lesquels il est procédé au recrutement de ces derniers sont au nombre des actes dont l'annulation peut être demandée au juge administratif par la voie du recours pour excès de pouvoir. Il en va de même, en l'absence de disposition législative ou réglementaire contraire, de l'acte par lequel il est mis fin par l'administration aux fonctions d'un de ses agents, alors même que cet acte se présenterait comme un contrat signé par l'administration et son agent ».


Le Conseil d’État juge ainsi que la Cour administrative d’appel a méconnu son office en se considérant saisie d'un litige de plein contentieux contractuel.


De plus, sur le fond, le Conseil d’État rappelle qu’une « personne publique n'est pas recevable à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu'elle a le pouvoir de prendre ». Or, « il était loisible à la chambre de métiers et de l'artisanat, si elle s'y estimait fondée, de retirer l'acte litigieux à raison de son illégalité ». Elle n’est, dès lors, « pas recevable à demander au tribunal administratif de Versailles l'annulation pour excès de pouvoir de l'acte contesté et n'était, par voie de conséquence, pas fondée à lui demander de condamner l'intéressé à lui rembourser l'indemnité versée ».


Le membre d’un jury d’examen n’a pas qualité pour demander l’annulation des décisions prises par le jury


Le tribunal administratif de Paris a annulé pour excès de pouvoir la délibération fixant la liste des candidats admis à l'examen professionnel de commandant de sapeurs-pompiers professionnels 

« et enjoint à l'administration de convoquer le jury pour qu'il délibère à nouveau et modifie en conséquence la liste des candidats admis ».


Un membre du jury d’examen ainsi qu’un syndicat se sont pourvus en cassation. Mais le Conseil d’État a rejeté leur pourvoi en jugeant que la Cour administrative d’appel n’avait pas inexactement qualifié les faits, ni commis d’erreur de droit en jugeant, d’une part, que le membre d’un jury ayant participé à ses délibérations ne justifiait pas

 « d'un intérêt lui donnant qualité pour en demander l'annulation » et d’autre part, que le syndicat « ne justifiait pas davantage, en tant que syndicat professionnel défendant les intérêts collectifs de ses membres, d'un intérêt pour demander l'annulation de décisions individuelles déclarant non admis des candidats à un examen professionnel ».


Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 26 septembre 2025, n°488401


La cessation d’activité rémunérée pendant un CITIS ne s’applique pas à un maire qui perçoit une indemnité 


Un fonctionnaire également maire, en congé pour invalidité temporaire imputable au service, demandait l’annulation de la décision suspendant le versement de sa rémunération ainsi que du titre de recettes émis pour le recouvrement d’un trop-perçu de rémunération. Son administration considérait, en effet, qu’il avait exercé une activité rémunérée dès lors qu’il avait été élu maire durant son CITIS et percevait, pour l’exercice de son mandat, des indemnités.


Après avoir rappelé que le « bénéficiaire d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service doit cesser toute activité rémunérée » et qu’en « en vertu de l'article L. 2123-17 du code général des collectivités territoriales, les fonctions de maire, d'adjoint et de conseiller municipal sont gratuites, sans préjudice des dispositions qui prévoient notamment des indemnités de fonction », la Cour administrative d’appel de Bordeaux juge qu’eu « égard au principe de gratuité des fonctions ainsi énoncé, les fonctions de maire ne peuvent pas être regardées comme des activités rémunérées ». Dès lors, le fait de percevoir des indemnités pour l’exercice de son mandat de maire, « ne saurait être regardé comme la rémunération d'une activité ».


La décision portant suspension du versement de sa rémunération et le titre de recettes émis ont été annulés. Il a également été enjoint à son administration de lui verser l'intégralité des traitements non perçus dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt.


CAA de Bordeaux, 4ème chambre, 26 septembre 2025, n°23BX02345

JDD n°49 - Novembre 2025


Bernard de Froment - Ancien député et Président du conseil départemental de la Creuse, Avocat spécialisé en droit public associé du cabinet Publica-Avocats
Bernard de Froment - Ancien député et Président du conseil départemental de la Creuse, Avocat spécialisé en droit public associé du cabinet Publica-Avocats

Aux termes de l’article L.1240 du Code civil : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »


Mais jusqu’à la fin du XIX e  siècle, l’irresponsabilité de la puissance publique était pourtant le principe.


Les seules exceptions à ce principe hérité de l’Ancien Régime, selon lequel « Le roi ne peut mal faire » concernaient les cas où une loi en décidait expressément ainsi : c’était par exemple le cas des dommages causés aux bâtiments par les travaux publics.


La possibilité d’obtenir réparation des dommages n’était ouverte que par le recours gracieux, c’est-à-dire l’appel à la bonne volonté des dirigeants.


Mais l’arrêt Blanco, rendu par le Tribunal des conflits le 8 février 1873 (n°00012 publié au Recueil Lebon et aux G.A.J.A.), est venu pour la première fois reconnaître une responsabilité de principe des personnes publiques, en l’assortissant, cependant, des précisions suivantes, toujours d’actualité :


« Considérant que la responsabilité, qui peut incomber à l’Etat, pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu’il emploie dans le service public, ne peut être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil, pour les rapports de particulier à particulier.


Que cette responsabilité n’est ni générale, ni absolue ; qu’elle a ses règles spéciales qui varient suivant les besoins du service et la nécessité de concilier les droits de l’Etat avec les droits privés.

Que, dès lors, aux termes des lois ci-dessus visées, l’autorité administrative est seule compétente pour en connaître »


Depuis 1873, la jurisprudence administrative n’a pas cessé de se développer en précisant les cas et les conditions dans lesquelles la responsabilité de l’Etat et des autres personnes publiques pouvait être engagée et donner lieu à indemnisation.


Le but de la présente chronique n’est naturellement pas de dresser l’historique de cette évolution, ni d’énumérer les cas retenus de responsabilité pour faute (le cas général) ou sans faute, l’exception (telle la responsabilité du fait des lois 1 )


On se bornera à indiquer que dans tous les cas de responsabilité administrative, le justiciable devra démontrer le préjudice et le lien de causalité entre le fait générateur et le préjudice.


Si j’ai choisi d’évoquer cette responsabilité des personnes publiques dans la survenance d’un dommage, c’est parce que l’actualité, les récentes décisions du Conseil d’Etat (Décisions n° 489593, 489594, 489596, 489597, 489962 du 16 octobre 2025), démontrent que la plus haute juridiction administrative sait se montrer rigoureuse face aux justiciables qui entendent à tout prix rendre responsable l’Etat ou les autres personnes publiques des préjudices qu’ils subissent.



1 La responsabilité de l’État peut être reconnue en cas de rupture de l’égalité devant les charges publiques. C’est la décision du Conseil d’État du 14 janvier 1938, 

“ Société La Fleurette ” qui reconnaît pour la première fois cette responsabilité étatique. En effet, l’interdiction de la gradine, (ersatz de crème) a fait peser une charge reconnue comme grave et spéciale sur la société à cause de l’État, lequel doit donc l’indemniser.  Il s’agissait, en effet, pour l’entreprise d’une charge anormale, en raison de ses conséquences économiques graves, la gradine étant le seul produit que cette société fabriquait.



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Comme si devait exister un principe selon lequel la maladie ou la mort de personnes proches (conjoint, enfant, parent,…) auraient dû pouvoir être évitées par les pouvoirs publics !


Nos concitoyens, en effet, qui n’ont jamais dans leur comportement personnel été aussi individualistes, se montrent tout autant enclins à exiger de l’Etat une protection démesurée, que celui-ci ne peut plus leur accorder sans creuser davantage les déficits et augmenter la dette extérieure du pays : le débat actuel sur la suspension de la réforme des retraites ou celui sur les franchises en matière de remboursement des frais de santé en sont, entre autres indices, l’illustration.


Les décisions du Conseil d’Etat statuant au contentieux du 16 octobre dernier s’inscrivent dans ce contexte d’une exigence sociale toujours plus grande face aux accidents de la vie ou aux impondérables.


Voici des extraits du communiqué de presse publié par la haute juridiction administrative dans cette « affaire des masques » :


« Saisi par des proches de personnes décédées de la covid-19 qui demandaient à être indemnisés par l’État, ( … ), le Conseil d’État précise aujourd’hui les obligations qui incombent à l’État en matière de préparation et de réponse aux alertes et crises sanitaires.

La loi confie en effet à l’État – conformément à l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé – une mission de préparation aux alertes et crises sanitaires, qui consiste à assurer une veille sur les risques sanitaires graves susceptibles de menacer la population et, afin de prévenir et limiter les effets sur la santé des différentes menaces possibles, de définir, en l’état des connaissances et au regard des moyens dont il dispose ou auxquels il peut faire appel, les mesures destinées à s’y préparer. Elle lui confie également une mission de gestion de ces alertes et crises, qui consiste, en cas d’alerte ou de crise sanitaire, à prendre les mesures appropriées aux circonstances de temps et de lieux pour la protection de la population et la prise en charge des victimes.

(…)

Dans le cas de la pandémie de covid-19, s’agissant de la préparation à la crise, le Conseil d’État relève que l’État a identifié dès 2004 le risque d’émergence d’un agent respiratoire hautement pathogène, qu’il a élaboré, à compter de cette date, une doctrine de constitution et d’utilisation de plusieurs niveaux de stock de masques qui a été régulièrement réévaluée et a notamment tenu compte des enseignements de la gestion de l’épisode de grippe A (H1N1) survenu en 2009 et des recommandations du Haut Conseil de la santé publique, et qu’il a constitué un stock stratégique national de 100 millions de masques chirurgicaux destinés aux personnes malades, à leur entourage, les employeurs privés et publics, y compris les établissements de santé et médico-sociaux, étant responsables de la constitution de stocks de masques pour leur personnel. Le Conseil d’État juge qu’une telle préparation à la crise ne traduit pas de faute. Le fait d’avoir pu constater, a posteriori, que le nombre de masques disponibles au sein du stock national s’était révélé insuffisant pour répondre aux besoins de protection de toute la population ne conduit pas à retenir que l’État aurait manqué à ses obligations légales en matière de préparation aux crises sanitaires susceptibles de 

survenir. »


A propos de la communication gouvernementale et de l’adaptation des mesures à la situation constatée en France, le communiqué ajoute :


« S’agissant de la réponse à la crise sanitaire liée à la pandémie de covid-19, le Conseil d’État relève d’abord que la communication en deux temps des autorités publiques, qui a consisté, entre fin février et fin mars 2020, à préconiser que le port du masque soit réservé en priorité aux personnes symptomatiques et aux professionnels de santé, puis, à partir de début avril 2020, à inciter le grand public à porter des masques « alternatifs », était cohérente avec les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé, du Haut Conseil de la santé publique et des sociétés savantes et adaptée au contexte de pénurie mondiale de masques.


Le Conseil d’État observe ensuite que des commandes massives de masques ont été effectuées par Santé Publique France dès la fin du mois de février 2020, complétées par des réquisitions auprès des personnes morales de droit public et privé, et que le choix de distribuer ces masques en priorité aux professionnels de santé et aux établissements de santé était cohérent avec les recommandations scientifiques. Il estime enfin que des mesures ont été rapidement prises pour faciliter la production de solutions hydroalcooliques, que la stratégie de dépistage retenue était adaptée aux difficultés d’approvisionnement en réactifs chimiques et que la situation constatée en France avant le 16 mars 2020, eu égard au nombre de contaminations et au nombre de patients hospitalisés, ne justifiait pas de prendre, avant cette date, une mesure de confinement généralisé de la population.


Il en déduit que l’État a aussi respecté ses obligations légales en matière de réponse aux alertes et crises sanitaires.

Pour l’ensemble de ces raisons, le Conseil d’État juge que les conditions de l’indemnisation de fautes qui auraient été commises par l’État dans la mise en œuvre de sa mission de préparation ou de réponse aux alertes et crises sanitaires ne sont pas remplies. »


Les 4 décisions du Conseil d’Etat, commentées par la haute juridiction elle-même, ont le mérite de donner un avertissement à tous ceux qui souhaitent voir reconnaître toujours plus largement la responsabilité de l’Etat et des personnes publiques dans la survenance des préjudices qu’ils subissent.


En sifflant la fin de la partie dans « l’affaire des masques », la haute juridiction administrative, et c’est tant mieux, a ainsi démontré que « l’Etat-providence » a des limites.

 

Bernard de Froment



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