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L’Oeil de l’expert

  • La rédaction
  • 3 sept.
  • 4 min de lecture

JDD - Septembre 2025

Bernard de Froment, Ancien député et président du conseil départemental de la Creuse, avocat spécialisé en droit public associé du cabinet publica-avocats
Bernard de Froment, Ancien député et président du conseil départemental de la Creuse, avocat spécialisé en droit public associé du cabinet publica-avocats


Loi Paris - Lyon - Marseille : une loi de bon sens ! 


La décision du Conseil constitutionnel n° 2025-1129 QPC du 28 mars 2025 M. Rachadi S. (Démission d’office d’un conseiller municipal ayant été condamné à une peine complémentaire d’inéligibilité assortie de l’exécution provisoire), si attendue par la classe politique (et pas seulement par le Rassemblement National), a fait couler beaucoup d’encre.


Très attendue, cette décision l’était, parce nombreux étaient ceux qui pensaient que les sages du Palais-Royal, par la position qu’ils prendraient alors, allaient priver d’effet le jugement du juge pénal du tribunal judiciaire de Paris, en date du 31 mars 2025.


Celui-ci, pour mémoire, ajoutait à une peine de prison de 4 ans, dont 2 fermes aménagés sous bracelet électronique, et à une amende de 100.000€, une inéligibilité immédiate de cinq ans, compromettant la candidature de Marine Le Pen, à la présidentielle de 2027.



Comment pouvait-on imaginer priver la candidate adoubée, selon les sondages, par 30 à 35% des français, de représenter ceux-ci à l’élection cardinale de notre République et de diriger le pays, si elle parvenait à briser au second tour le plafond de verre qui, jusqu’à présent, (les dernières élections législatives l’ont encore démontré), font obstacle à l’arrivée au pouvoir du parti lepéniste ?


A l’appui de cette thèse courait, dans le landerneau politique, le bruit que la nomination de Richard Ferrand à la tête du Conseil constitutionnel, grâce à l’abstention opportune des députés du RN membres de la Commission des lois de l’Assemblée Nationale 1 , allait faire pencher les Sages de la rue de Montpensier, en faveur de la solution raisonnable ainsi résumée : un élu qui n’a pas été 


En validant la loi réformant le mode d'élection du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille, le Conseil Constitutionnel met fin à une anomalie qui privait les électeurs des trois plus grandes villes de France du droit de choisir eux-mêmes leurs mairie

définitivement condamné par le juge pénal ne peut pas voir l’inéligibilité prononcée à son égard, être exécutée immédiatement, tant que celle-ci n’a pas été confirmée par le juge d’appel, et devenue définitive après le rejet de son éventuel pourvoi en cassation.


Naïvement, comme d’autres, je m’imaginais que cette vision du droit était consubstantielle à l’Etat de droit !


Rappelons ici que cette notion, d’origine allemande (Rechtsstaat), a été redéfinie au début du vingtième siècle par le juriste autrichien Hans Kelsen, comme un État dans lequel les normes juridiques sont hiérarchisées de telle sorte que sa puissance s’en trouve limitée. 


Une application stricte de ce principe voudrait qu’une sanction pénale complémentaire privant un citoyen de ses droits civiques, comme une peine d’inéligibilité, ne puisse pas être appliquée tant que les recours nationaux de droit commun (appel et cassation) n’ont pas été rejetés.


Il ne s’agit pas d’une question théorique, car il arrive qu’une peine complémentaire d’inéligibilité prononcée, assortie de l’exécution provisoire, et donc appliquée, soit annulée en appel ou par l’effet d’un arrêt de la Cour de cassation.


1 lors du vote de confirmation du candidat à la présidence dudit Conseil proposé par le Président de la République,


Là encore, le Conseil constitutionnel a jugé cette différence de traitement justifiée. Il a rappelé que Paris, Lyon et Marseille se distinguent des autres communes par leur nombre d’habitants et leur organisation communale dérogatoire, ainsi que par un nombre plus important de membres au sein de leurs conseils, favorisant la

constitution de groupes politiques et d’alliances. L’objectif du législateur est en l’occurrence d’améliorer la représentation des diverses sensibilités politiques et de favoriser le pluralisme, rappelle le conseil, ce qui est un objectif de valeur constitutionnelle. La différence de traitement, fondée sur une différence de situation,

est donc jugée en rapport avec l’objet de la loi. Le Conseil a également précisé qu’aucun principe constitutionnel n’impose que les conseillers communautaires soient élus selon les mêmes modalités au sein d’une même intercommunalité.


- Les critiques portaient aussi sur la complexité excessive des nouvelles règles électorales, le risque de confusion pour les électeurs et l’impact sur la sincérité du scrutin, notamment à Lyon où des conseillers métropolitains sont également élus. La possibilité de faire figurer le nom et la photographie du candidat désigné pour

présider l’organe délibérant de la commune sur les bulletins de vote des conseillers d’arrondissement était également contestée. 

Mais le Conseil a estimé que les dispositions contestées, prévoyant deux scrutins de listes concomitants, n’instituaient pas de règles électorales d’une particulière complexité et étaient justifiées par l’objectif d’intérêt général de permettre aux électeurs de voter directement pour les membres du Conseil de Paris et des conseils

municipaux.


En conclusion, le Conseil Constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution l’ensemble des dispositions contestées de la loi, notamment celles relatives aux scrutins distincts, à la prime majoritaire spécifique, à l’entrée en vigueur de la réforme et à la création de la conférence des maires.


Et pour ma part, je ne peux que me réjouir d’une décision qui permettra désormais aux électrices et électeurs de Paris, Lyon et Marseille de choisir directement leur maire.


Bernard de Froment


« L’objectif du législateur est d’améliorer la représentation des diverses sensibilités politiques et de favoriser le pluralisme, rappelle le Conseil constitutionnel »

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